Le Moment Baroque nous a séduits par un très beau concert le 17 janvier dernier…sans public, au Temple Farel de La Chaux-de-Fonds. La RTS en a fait l’enregistrement où peut l’entendre encore. Bien inspiré en ces temps de mort, l’ensemble a choisi trois œuvres du grand Bach, puits de lumière et de projection d’un futur. Telles sont les « Mein Herz schwimmt im Blut » BWV 199, le concerto en La mineur BWV 1041, « Ich habe genug » BWV 82a…l’appel des profondeurs.
Ulrike Hofbauer, soprano, oriente son art vers l’ineffable, dans la conjonction confidentielle de l’interprète et du compositeur, deux âmes en accord intime, de 1714 à 2021 ! (tief gebückt…voller Reue… ich habe genug…). La brûlante fusion est logée là, patiente litanie et psalmodie étoilée des cantates qui cernent ? les arias autant que les récitatifs ? le tragique existentiel, nœud fort qui va vers l’espérance épanouie des harmonies et du texte. Le son axé sur le plus sûr contrepoint se pare d’inventions expressives et colorées, peinture de sang, celle des plafonds éclatants de la Renaissance et de Byzance en forme exubérante de charnel et en glorification de la spiritualité.
On aime l’art souverain de Claire Musard, hautbois, et de Sara van Cornewall, traverso, leur passion à accompagner l’émotion. Le même souffle anime Jonathan Nubel, premier violon, prince du solo inspirant violon 2 et viola. Lionel Desmeules structure le continuo au positif et au clavecin, tandis qu’Esther Monnat brille au violoncelle piccolo. Un concert de ferveur, de cœur.
Le hautbois ici, le traverso là, sont les deux couronnements solistiques. Même lumière par la musique.